Guinée : l’élite malinké est-elle consciente du mal qu’elle fait à la communauté à long terme ?

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De père et mère malinkés et témoin de l’histoire récente de la Guinée, je me pose des questions et m’inquiète de ce que l’avenir pourrait nous réserver en Guinée. Tant l’élite malinké ne cesse d’étonner et de se discréditer dans ce pays.

S’il y a aujourd’hui des jeunes malinkés honorables qui se distinguent dans la défense de la République et des principes de la démocratie comme les Souleymane Condé, Amara Kaba, Madic 100 frontière, Moussa Tata Kourou Diawara, Fodé Diakité etc., les anciens eux qui devaient montrer l’exemple, brillent par la trahison et les retournements de vestes. Dans l’administration, dans la police, dans la société civile comme dans les partis politiques, ils ont systématiquement trahi ces dernières années pour des intérêts personnels et égoïstes en prétendant agir dans l’intérêt de l’ethnie.

Depuis l’arrivée d’Alpha Condé au pouvoir en 2010, avec le concours pratiquement de tous coalisés à cet effet au deuxième tour, ceux des syndicats, ceux de la société civile auxquels on réserve la présidence de la CENI, ont tous œuvré pour détruire ces structures et les rendre inopérantes de l’intérieur. Tous les acquis démocratiques de l’ère Conté ont été systématiquement démantelés pour nous ramener à un régime dictatorial pur et dur digne des années 70.

Pratiquement, tous les cadres malinkés qui ont occupé des hautes fonctions nationales ces 10 dernières années ont violé leur serment, trahi la République et le combat pour la démocratie. Citons quelques exemples : Alpha Condé, Amadou Damaro Camara, Alassane Condé, Bouréma Condé, Lounceny Camara, Bakary Fofana, Salifou Kébé.

Qu’en est-il des leaders politiques ?

Le président et leader du RPG-arc-en-ciel, Alpha Condé

Son manque d'honneur et de parole se passent de tout commentaire. Jamais dans l'histoire de l'humanité, un chef de société ou d'Etat ne s'est montré aussi frivole et non fiable, irrespectueux des accords et des lois de son pays.

Lansana Kouyaté

En 2007, le peuple débout, lutta pour arracher du dictateur Lansana Conté, la nomination d’un Premier ministre et chef de gouvernement aux pouvoirs élargis. Bilan de la répression : 207 morts et plus de 2000 blessés par balles. Le PM choisi, Lansana Kouyaté, reçut une feuille de route acceptée officiellement par le Président Conté autorisant l'ouverture d'une enquête indépendante pour identifier et sanctionner les responsables des massacres et rendre justice aux victimes. Installé au pouvoir, Lansana Kouyaté oublie sa feuille de route qui était le pacte avec le peuple et poursuit son agenda personnel. Ce qui provoquera la rupture entre lui et Alpha Condé qui attendait plutôt qu’il se rallie au RPG. D’ailleurs, le leader du RPG ne pardonnera pas à certains militants engagés du RPG, comme la bouillonnante Mme Doussou Condé des USA, qui soutiendront Lansana Kouyaté. Si Lansana Kouyaté avait respecté son engagement en 2007-2008, l’Etat de droit se serait irréversiblement implanté en Guinée. Il est quatrième force politique du pays avec 7% du poids électoral national. Après que le leader de l’UFDG ait rejeté sa demande de rejoindre l’alliance des Bâtisseurs au second tour, Lansana Kouyaté rejoint celle d’Alpha Condé à laquelle il apportera le gros des contributions. Trahi par le président Alpha Condé, il rejoint l’opposition où il a gardé une constance jusqu’au FNDC. Mais après le coup forcé d’Alpha Condé du 22 mars 2020, Lansana Kouyaté qui devrait être plus critique aujourd’hui contre le despote putschiste parle d’Alpha Condé avec plutôt des flatteries qui n’ont échappé á aucun auditeur de la radio Espace FM (émission GG) :

« Alpha Condé, c’est un politicien hors pair. Il pense politique, il vit politique, il raisonne politique et pour la gestion de l’État, il n’a reçu encore une main heureuse. »

Ses attaques seront plutôt dirigées contre le député de l’UFDG Ousmane Gaoual Diallo censé être un allié de circonstance au sein du FNDC :

« Ousmane Gaoual Diallo : il fait partie des détritus de la politique guinéenne. »

Une réplique de ce dernier aurait donné quoi au sein du FNDC ?

Amadou Damaro Camara

Il fut au cœur de toutes les stratégies du RPG et d’Alpha Condé pour la conquête et la conservation du pouvoir depuis 2010. Il est un des principaux concepteurs du pacte des 3 régions : Présidence de la République (PR), Haute Guinée. Primature (PM), Basse Côte et Présidence de l’Assemblée Nationale (AN), Guinée Forestière.

A la fin du règne démocratique d’Alpha Condé, il est un des acteurs principaux du changement de la Constitution pour un troisième mandat qui ne cache autre que la conservation du pouvoir entre leurs mains à tout prix. Se doutant qu’Alpha Condé ne terminerait pas cette ou une nouvelle législature, Damaro et son clan œuvrent à mettre toutes les institutions du pays qui seront actrices de décision sous leur contrôle : la CENI, la police, l’armée et l’AN. La Primature étant dépouillée de ses fonctions n’est plus un enjeu. On peut la laisser aux autres. C’est ainsi qu’ils ont créé des conditions inacceptables qui empêchent les autres de participer aux législatives. Le RPG s’assure ainsi la majorité absolue de l’AN et ils brisent le pacte avec la Forêt au profit d’Amadou Damaro Camara. Question de ne pas prendre des risques de voir le pouvoir tomber entre les mains d'un Forestier, fut-il du RPG, en cas de vacance du pouvoir, même pour une période de transition.

Aussitôt installé à la tête de l’AN, Damaro engage des projets de changement de lois qui risquent de mettre du feu aux poudres en Guinée : des circonscriptions comme Kankan et Matoto doivent avoir 4 députés uninominaux, les chefs de quartiers seront nommés par le Ministère de l’Administration et demander aux gens de ne pas participer à un vote devient un délit puni par la loi.

Où est-ce que ce régime veut-il nous amener ?

Après le coup de force du 22 mars avec le bilan que l’on sait, ce pouvoir aurait été bien conseillé de mettre de l’eau dans son vin pour les 5 mois restants du mandat en cours.

Le Dr. Ousmane Kaba

Avec des propos ethniques tenus à Kankan sur fond d’incitation des Malinkés à tout faire pour conserver « la Calebasse de lait », entendez le pouvoir, il est redevenu fréquentable à travers son engagement dans le FNDC.

Ses derniers propos, parlant de fin 2020 :

«… C’est ce que j’envisage si mon parti politique est d’accord et c’est ce que les militants souhaitent également, je dis bien si le congrès du parti approuve cette décision, avec ou sans le professeur Alpha Condé, je serai candidat » (Lire).

Une telle prise de position et déclaration unilatérale en ce moment ne risquent-t-elles pas d’encourager Alpha Condé à considérer que son but est atteint et contribuer à créer des dissensions qui vont affaiblir le mouvement national FNDC ?

Quand on se rappelle que lors qu’Alpha Condé composait son gouvernement en 2018, Ousmane Kaba avait aussi déclaré qu’il est prêt à intégrer la mouvance si le Président le nommait Ministre, on a raison de s’inquiéter et de se poser la question sur les convictions de ce leader politique au sein de l’opposition. C’est Alpha Condé qui ne l’avait pas voulu en lui créant des conditions inacceptables comme la dissolution de son nouveau parti.

A cette allure, l’élite malinké guinéenne finira par détruire toute base de confiance en elle en Guinée. La fidélité, la parole donnée ou le serment jadis si importants dans la culture mandingue n’ont plus aucune valeur pour eux.

Je rêve de voir une personnalité malinké de l’Etat ou de l’opposition qui respecte sa parole de nos jours en Guinée ! Il y va de l’avenir de vos enfants dans ce pays. Car, les Guinéens ont de plus en plus peur de voir un Malinké prendre la tête d’une institution en Guinée.

Je rappelle à nos parents que c’est par le respect de la parole et du pacte que l’empire du Mandingue a pu exister sous le règne de Soundiata. Les deux chasseurs ont pu tuer la buffle quand ils ont donné leur parole à cette dernière de prendre sa protégée nièce Sogolon Kedjou pour épouse ou lui trouver un mari. La vieille grand-mère buffle leur donna sa vie sur la simple parole, parce qu’au Manden, la parole donnée était sacrée.

 

NAMORY CONDE,
Pour GuineePresse.Info

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